L'inégalité comme concept central
L'hypothèse centrale du livre de Piketty est que, en l'absence d'intervention extérieure, le système capitaliste continue de creuser l'écart entre les riches et les pauvres. Depuis le début de la révolution industrielle occidentale, le rendement de l'investissement et du capital a été supérieur au rendement du travail. Piketty affirme que le scénario du milieu du XXe siècle, lorsque cette tendance s'est inversée, n'était qu'une exception à la norme. Deux guerres mondiales et la Grande Dépression avaient fait disparaître des fortunes à l'époque, et les politiciens sociaux-démocrates ont tenté de compenser ces pertes par la redistribution.
Piketty affirme également que le déséquilibre économique actuel n'a jamais été aussi grave depuis les années qui ont précédé la Première Guerre mondiale, et ce malgré l'absence de redistribution sociale et d'impôts progressifs à l'époque. De nombreux économistes américains rejettent toutefois cette idée, soulignant que Piketty ne présente dans son premier livre, Capital, que des données sur l'évolution du revenu brut avant impôts et sans tenir compte des transferts sociaux gouvernementaux en constante augmentation, ce qui fausse l'image de la situation actuelle.
Source : AFP
Critique sur la naïveté et les faux chiffres
Les critiques du livre de Piketty l'accusent également de tenter d'utiliser des statistiques pour démontrer la montée des inégalités dans le monde occidental, mais le livre contient des inexactitudes et des données choisies de manière sélective, voire inventées, qui remettent en cause le principal postulat du livre. C'est, par exemple, la conclusion d'une analyse du Financial Times de 2014.
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Le journal britannique a découvert des failles dans les tableaux qui servent de base au raisonnement du livre. Lorsque les données du livre ont été nettoyées, on a découvert, par exemple, qu'il n'y avait pas de modèle après 1970 pour la croissance de l'inégalité que Piketty a découvert dans ces tableaux.
Le Français a déclaré au journal qu'il n'avait pas connaissance d'erreurs majeures et qu'il "serait très surpris que ces améliorations affectent d'une manière ou d'une autre les conclusions fondamentales sur l'évolution à long terme de la répartition des richesses".
Une autre critique importante est apparue avec son deuxième livre, "Capital and Inequality", dans lequel il explique comment l'intérêt du capital garantit que l'on produise moins et moins efficacement qu'il ne serait possible de le faire autrement. Il continue également à plaider en faveur d'un impôt presque confiscatoire sur les revenus et les richesses extrêmement élevés. Si rien n'est fait pour remédier à cette injustice, cela entraînera un mécontentement social et des tensions qui affaibliront la démocratie. Selon Thomas Piketty, seule une intervention de l'État, sous la forme d'une taxation de la richesse, peut inverser cette tendance. Il ajoute que le revenu fiscal devrait être utilisé pour fournir à chaque jeune de 25 ans un "héritage universel" de 120 000 euros comme capital de départ.
Pour réfuter les affirmations de M. Piketty, le journal économique allemand "Der Handelsblatt" souligne que la France, qui avait un taux d'imposition maximal de 90% sous l'ancien président Hollande, a démontré que ceux qui en sont redevables peuvent l'éviter en s'installant à l'étranger. Ces mouvements de fuite seraient accélérés si l'on collectait davantage d'argent par le biais de l'impôt.
Redistribution massive contre limites économiques
Dans ses recherches et ses livres, Piketty s'appuie à plusieurs reprises sur des statistiques, telles que le rapport d'Oxfam sur les inégalités, les rapports annuels sur la richesse mondiale du Credit Suisse et les statistiques d'autres institutions réputées mesurant la répartition de la richesse mondiale.
Un grand nombre d'économistes soutiennent toutefois que d'autres aspects doivent être pris en compte pour mesurer objectivement l'état de l'inégalité au niveau mondial. Les deux principales objections sont les suivantes : (1) un capitalisme trop réglementé pourrait signifier trop peu de liberté et (2) les États interviennent de plus en plus dans de nombreux domaines de la vie quotidienne, y compris l'économie, et il n'est pas nécessaire d'augmenter la fiscalité.
Au contraire, une redistribution massive des ressources, une réglementation qui limite la concurrence en raison de la mise en place de barrières à l'entrée sur les marchés, ou des charges bureaucratiques et fiscales pesant sur la classe moyenne peuvent toutes constituer des obstacles à l'augmentation de la richesse au niveau mondial.
L'économiste Edmund Phelps, lauréat du prix Nobel, affirme que les propositions de M. Piketty profitent principalement à ceux qui se trouvent du "bon côté" de la barricade, recevant des aides de l'État dans l'"intérêt public" au détriment de tous les autres. En particulier, ce sont les plus riches qui ont le plus d'influence sur les hommes politiques, sapant ainsi les processus démocratiques. Par leur intermédiaire, ils se sont dotés d'une législation qui leur convient mais qui nuit à l'ensemble de la société. Un tel ordre économique, éloigné de la véritable essence du capitalisme, est à l'origine du ralentissement de la croissance économique, de la redistribution des richesses et de l'accroissement des inégalités, qui peuvent avoir des effets macro-économiques et sociologiques dévastateurs.